Non, non, HAL Laboratory Inc. n’est pas un industriel côté en bourse et spécialisé dans la chimie pétrolifère pour la confection de pneumatiques pour tracteur. Non, cette société de développement est associée à jamais à Nintendo pour Smash Bros et Earthbound, mais aussi pour une de ses figures les plus emblématiques, Satoru Iwata, qui fut président des 2 compagnies à différentes périodes. Elle a aussi, petite anecdote amusante, le même nom que l’I.A tueuse dans 2001, l’Odyssée de l’espace tout en étant ironiquement la spécialiste des petites douceurs vidéo-ludiques.
Les ingrédients pour réaliser ces douceurs sont toujours les mêmes depuis des décennies et un certain Rollerball ou un Adventure of Lolo sur MSX ; et il sont dosés à la perfection : un peu de guimauve « fluff », mais point trop, juste assez pour rappeler l’enfance, une pâte moelleuse et aérienne, une pointe de fleur d’oranger pour s’envoler et des dragibus de toutes les couleurs pour enjôler. Le tout nous fait avoir les joues toutes roses, comme leur mascotte, Kirby, l’emblématique ballon de baudruche qui aspire tout sur son passage.
Avis aux gourmands, faire la guerre en mode mignon, c’est ce que promet cette production HAL Laboratory en 1991 sur la Game Boy en Noir et Blanc. Sans violence, ou presque… On peut tout ravager sur son passage, même les éléments du décors sont destructibles comme les arbres ou les cahutes. Notre Tank est un Kirby avant l’heure, tout rond, rondouillard, porté par quatre petites roues mignonettes. Fier comme Artaban, diablement expressif, le petit bougre de métal avance, recule, tire dans tous les sens !
Le scrolling est multidirectionnel, on peut se déplacer en tout liberté tout en dirigeant notre tir. Notre tourelle, un peu rouillée, tourne avec nonchalence, toujours dans le même sens, comme si notre tank asthmatique n’était pas doté des dernières technologies. Il est vraiment trop trognon (de pomme). Nos armes spéciales sont des classiques (tir triple, bombe explosive, tir devant/derrière, obus filant tout droit et détruisant tout sur son passage) mais elles sont particulièrement efficaces.
En face, l’ennemi fera face comme il peut. Les ennemis de base sont des tanks comme nous, gris, peu résistants et assez lents à réagir, d’autres sont un peu plus high-tech et véloces, comme ces méchas bipèdes qu’on croirait tout droit venus de l’univers Star Wars. Sortis de leurs boîtes, comme sur ressort, les boss et les demi-boss font peur… pour de rire. Le plus emblématique est certainement le robot géant, qui a une clé à remonter dans le dos, comme ces poupées mécaniques que l’on trouve dans les vieux coffres à jouets.
Tout détruire, oui, mais avec une joie toute enfantine comme le grand enfant de 4 ans et demi que nous sommes. Avec bonne humeur. Même la foire aux missiles et les explosions parviennent à être kawaï.
Ça a beau exploser de partout, l’action, en plus d’être entraînante, est parfaitement lisible sur le petit écran noir et blanc de la Game Boy. Les graphismes sont habilement épurés pour un résultat net, chacun des éléments (ennemis, tirs etc…) se distinguant parfaitement, en toute circonstance. Même si on peut regretter (et encore, ça fait partie du charme) ces fameux ralentissements d’antan, qui surviennent lorsqu’il y a trop de sprites à l’écran, Trax est un jeu réalisé avec soin.
Le jeu est trop court ? Vies à foison dans le décor et 4 niveaux telle une balade digne de la maternelle, nous sommes tenus par la main, des vertes plaines à Megacity (la ville des méchants pâbos) en passant par la base en plein milieu du désert et les sombres cavernes, un périple quasiment sans danger comme ceux proposés dans les jeux Kirby. C’est un mal pour les gamers et les hardcore killers, mais pourquoi chercher le sel et le poivre alors que tout n’est que sucre. Sucre pétillant, miel cajoleur, sirop de grenadine. Pour votre serviteur qui a 11 ans lorsqu’il a découvert ce titre, Trax a été une part de tarte aux pommes, à Noël. Puis une friandise acidulée, goût citron tout doux, qui fond sous la langue, les soirs d’été.
Rejouer, c’est une hérésie aujourd’hui : sitôt le jeu fini, il faut passer à autre chose. On oublie que le shmup est le genre idéal de la rejoute. Alors, rejouons sans fin à Trax. Le jeu ne propose pas de Hi-score pour s’améliorer, non juste une aventure agréable et éphémère d’une vingtaine de minutes, idéale pour le goûter, à répéter tous les trois, quatre ans comme on répète ses gammes.
Avec le cable Link, on pouvait y jouer à 4. Il y a plein d’arènes pour des duels à mort épiques, on peut même les tester en solo en affrontant le CPU et finir sur la plus haute marche du podium… La possibilité d’y jouer en réseau dans des deathmatch en 1991, avant les Dooms, les Quakes et les Unreals, c’est déjà un peu fou. Même si bien sûr l’opportunité d’avoir 4 amis possédant le même jeu et la game boy noir et blanc s’amenuise de jour en jour…
Seul, je ne boude pas mon plaisir d’y rejouer. Si j’y joue encore, à quarante ans passé, une après-midi ensoleillée d’automne (dans un transat, sous un arbre, soyons précis jusqu’au bout), c’est pour retrouver l’enfance. Le ressenti, adulte, a changé. Jamais en mal. La partie se finit vite, aucune entrave, les missiles ennemis s’évitent avec une facilité déconcertante tant ils sont lents et prévisibles. Les boss offrent un peu plus de résistance…
Mais ce sont surtout les graphismes simples mais adorables, les animations délirantes, pleine de mitrailles enjouées, et la mélodie 8-bit titillante qui font remonter les souvenirs. Et les premiers d’entre eux, c’est une effluve de pâte à tartiner choco-noisette et le goût d’un grand verre de lait… Une fois la partie finie (le temps de la récré), l’enfance est passée, les vieilles piles sont usées mais Trax et son charme fou sont toujours là !