29 novembre 1986: Ryo Hazuki rentre au dojo familial et sans le savoir, va voir sa vie basculer. Il assiste impuissant au meurtre de son père des mains d’un chef de la triade chinoise. Ryo intervient pour le défendre, mais sans succès. Impuissant, son père meurt devant ses yeux et Lan Di (l’assassin) s’en va avec la relique qu’il était venu chercher, le miroir du dragon. Quelle est la valeur du miroir du dragon? Pourquoi Lan Di a-t-il tué Hazuki-sensei? Est-ce que Ryo se vengera de Lan Di? Pour les réponses à ces questions, vous devrez jouer au lègue qu’a fait Yu Suzuki au jeu vidéo, le fameux Shenmue de SEGA.
Un système révolutionnaire
Dans Shenmue, vous vous promenez, recherchez des objets, parlez aux gens, travaillez pour gagner un salaire et bien évidemment, rassemblez des indices dans le but de retrouver le tueur d’Hazuki sensei. Comme le font aujourd’hui, bon nombre de jeux en monde ouvert avec plus ou moins de succès, dès 1999, et pour la première fois (ou presque), Shenmue combine et compile un nombre conséquent d’éléments de gameplay dans le but d’atteindre un niveaux de réalisme jamais vus auparavant. De plus, il y ajoute une histoire de premier ordre ayant pour thèmes la perte d’un être aimé, l’amour et la trahison.
Ces éléments se répartissent en quatre catégories: quête, bataille, mini-jeux et « Quick Time Event ». Les fameuses QTE consistant à réagir en appuyant au bon moment sur les boutons qui s’affichent à l’écran lors de phases d’animation en moteur de jeu. Ces QTE sont symboliques de Shenmue et se démocratiseront ensuite un peu partout dans le jeu vidéo à partir de là.

Une introduction éternelle qui nous laisse dans l’expectative depuis plus de 20 ans.
Les QTE
L’exploration et la déambulation dans la ville de Yokosuka est la partie principale du jeu, dans laquelle vous passerez des heures à interagir avec des personnes, des lieux et des choses dans les cinq magnifiques environnements de Shenmue. Dans chaque ville, vous pouvez parler à chaque habitant, examiner chaque objet, frapper à chaque porte et explorer chaque magasin. La notion de temps qui passe est cruciale puisque chaque personnage du jeu est programmé pour avoir une vie quotidienne minutée. Ainsi en fonction de l’heure de la journée, vous pourrez ou non parler à telle ou telle personne. Ce concept, totalement novateur pour l’époque, amène le jeu vidéo dans la vie réelle. Et c’est ça la plus grande force du jeu de Yu Suzuki. Si vous pouvez entrer dans tous les magasins et restaurants ouverts, vous ne pouvez jamais commander de nourriture ou acheter des articles, mais bon nous sommes sur Dreamcast ! Les seules exceptions à cette règle sont le magasin avec les Gashapon et la salle d’Arcade.
Du dojo à la rue
Si Ryo passe beaucoup de temps à faire des petits boulots pour accumuler assez d’argent pour poursuivre le meurtrier de son père, il sera de nombreuses fois obligé de se battre. C’est donc tout naturellement que l’autre élément de gameplay principal est le mode combat. Il est inspiré de Virtual Fighter, un autre jeu crée par Yu Suzuki. À l’aide du contrôleur, vous devez exécuter des coups de poing, des coups de pied et des mouvements variés afin de vaincre vos ennemis. Si vous réussissez, une séquence QTE ou la chance de parler à quelqu’un se débloque. Si vous échouez, eh bien, vous essaierez à nouveau, car vous ne pouvez pas vraiment échouer dans Shenmue et le jeu vous proposera toujours de recommencer sans passer par la case game Over et chargement de la dernière sauvegarde. Le système de combat marche bien, mais il est entravé par des exigeantes phases d’entraînement fastidieuses et un manque d’adversaires intéressants. À part Chai, un expert maladif du kung-fu, chacun des adversaires du jeu est facile à vaincre. Si quelques rares moments proposent de pousser le système de combat, l’ensemble du titre est plutôt avare sur ce point.

La philosophie du bandeau, c’est ça l’esprit Shenmue !
De la salle d’arcade aux Gashapon
Le jeu comprend également un certain nombre de mini-jeux et ces derniers gravitent surtout autour de la salle d’Arcade. Cette idée totalement novatrice pour l’époque, a laissé un souvenir unique à tout les nostalgiques de SEGA, puisqu’elle amène la possibilité de rejouer, à travers le spectre de Ryo à des classiques du maitre Suzuki tels que Hang On ou Space Harrier. Autre détail marquant la minutie apporté à Shenmue, vous pouvez même gagner les jeux Hang On et Space Harrier et y jouer sur la Sega Saturn de Ryo à la résidence Hazuki. Il y a aussi bien sûr la partie collectionnite compulsive dans Shenmue, car vous pouvez acquérir un certain nombre de jouets et de babioles comme des mini Sonis ou Tails dans les Gashapon à ajouter à la collection de bibelots de Ryo. Franchement, c’est une sacrée bonne chose que Shenmue ait ces divertissements.

Le dojo où tout commence
La vie au jour le jour
L’un des aspects marquant de Shenmue c’est la manière dont le jeu marque le quotidien. Le but de yu Suzuki, au delà de raconter une histoire, c’est d’amener le joueur dans la vie quotidienne de Japon des années 80 et ainsi créer une immersion. Faire des courses et circuler en ville sont des choses parfois rébarbatives de la vie humaine, mais en les intégrant au coeur du gameplay, cela crée une notion d’immersion. Si aujourd’hui en 2020, un certain jeu vidéo cherche à aller dans cette voie, et qu’elle est de plus en plus acceptée par les joueurs, à l’époque de Dreamcast c’était très déstabilisant, surtout venant d’un éditeur fort de ses succès arcade au plaisir de jeu immédiat. Tout les matins, Ryo se réveille à 8h30 et doit être au lit avant 23h30. Cela vous donne 15 heures par jour de jeu pour parler aux gens, rechercher des indices et progresser. Cependant, comme évoqué plus haut, certaines personnes n’apparaissent qu’à certains moments de la journée, tandis que d’autres exigent que vous preniez rendez-vous pour les voir. Étant donné que chaque heure du jeu, dure environs cinq minutes en temps réel, il n’est pas rare de se retrouver avec 30 minutes à attendre ou à contrario, de louper un rendez-vous. Si l’ambiance unique, les mini-jeux et les éléments d’entraînement aux arts martiaux aident, après trois disques, ces mécaniques peuvent devenir ennuyeuses. Passé la découverte, la routine peut s’installer et en lasser certains.

Au boulot tous les matins sur les docks pour des courses de fenwick « inoubliables »
Une bande-son culte et des choix de doublage discutables
Soutenant l’histoire et les moments intenses de gameplay, la musique de Shenmue est un véritable exemple de grandeur en terme de bande-son. Yu Suzuki à l’aide de son équipe musicale, composée entre autres de Yuzo Koshiro, ont mis au point l’une des meilleures bandes sonores jamais crée dans un jeu vidéo. Chaque thème parvient à habiter et à intensifier chaque moments du jeu. Hélas il en est autrement d’un point de vue du jeu d’acteur qui est, en version américaine, aléatoire. Imposée sur la version Dreamcast européenne, on passe du très bon au médiocre alors que le doublage japonais est lui, beaucoup plus travaillé. Les performances de calibre shakespearien des aînés Hazuki, Fukuhara, Goro et Nozomi doivent être louées, mais le travail vocal du personnage Ryo manque d’emphase et de crédibilité. Le garçon est monocorde, et la façon dont il réagit sèchement aux départs de Nozomi et Tom le déshumanise. Malgré ces problèmes, on ne peut pas nier que les superbes visuels du jeu et son histoire riche en émotions méritent d’être vécus.
Le disque passeport
Un élément non négligeable de Shenmue est le disque Shenmue Passport qui l’accompagne. En plus des nombreuses fonctionnalités liées à Internet qu’il possède, le disque Passport vous permet également de visualiser un certain nombre de didacticiels de gameplay et de vidéos promotionnelles, ainsi que d’écouter toutes les partitions merveilleusement orchestrées de Shenmue. Il est fortement recommandé de parcourir les didacticiels (encore plus que de lire le manuel) mais votre visite au Shenmue Passport ne doit pas s’arrêter là. Au fur et à mesure que vous progressez dans le jeu, vous débloquerez la possibilité d’écouter plus de morceaux de musique et de voir plus de scènes de cinéma. Si votre Dreamcast est connecté à Internet, vous pouvez même échanger vos doubles récupérés au gashapon, consulter les statistiques du jeu et enregistrer vos meilleurs scores en ligne. Curieusement, cependant, vous ne pouvez pas afficher votre inventaire ou vos statistiques de jeu sur le disque Passport sans vous être d’abord connecté à Internet.

Grace à la nouvelle édition PS4_One, le jeu dispose enfin d’un lissage, d’une traduction française et des doublages Japonais à destination du public français.