Gotzendiener, en voilà un titre bien étrange pour un jeu qui l’est par ailleurs tout autant, Gotzendiener signifie « Idolâtrie » en allemand, et pour cause compte tenu du pitch du jeu. Le titre sort en 1994 sur PC Engine CD. Il est développé par le studio Gainax, rendu célèbre pour avoir réalisé parmi les plus illustres animés japonais des années 80 et 90 tels que, Nadia et le secret de l’eau bleue ou encore Evangelion. Dès la fin des années 80, Gainax s’était essayé aux jeux vidéo sur les gammes de PC nec 88 et 98 ainsi que sur console. On leur doit par exemple la fameuse collaboration sur Alisia Dragoon Megadrive, avec Game Arts, où le studio assurait toute la création du lore du jeu, tandis que les créateurs de Lunar chapeautaient la partie jeu.
Tout commence par une vidéo aux teintes sombres et au design très Japanim 90’ mettant en scène le rapt d’une jeune et belle demoiselle par un démon. Au fil des quelques plans construisant une introduction efficace en images fixes, sommairement animés, s’installe une ambiance forte d’héroïc fantasy, teintée de dark fantasy. S’ensuit logiquement l’arrivée d’un chevalier dans la demeure du démoniaque ravisseur. Notre valeureux est venu dans le but de libérer la jeune et frêle prisonnière. Une lutte à mort oppose donc le preux protecteur du bien et le malin. Ce duel se solde par la mort du belliqueux, avant que ne tombe blessé mortellement au combat, ce qui logiquement aurait dû être notre héros. Jusqu’alors enchaînée et tout entière à la merci des forces du mal, la belle parvient finalement à se détacher ! Et c’est ainsi qu’étonnement que le jeu commence. Vous prenez le contrôle de la jolie Kishrim Misa, sorte de princesse Zelda ayant décidé de ne pas attendre l’arrivée d’un second Link pour la sauver. Bien décidée à sortir elle-même de sa prison, elle déchire sa robe trop volumineuse pour se déplacer correctement et part en culotte longue arpenter les murs de sa prison. Par ce petit contre pied scénaristique amusant, le jeu se démarque et réaffirme l’intérêt qu’a toujours porté la Gainax pour les personnages de femmes fortes et à la fois sexy. Pour ce nouveau projet vidéoludique arrivant assez tard dans la vie de la PC Engine, Gainax se la joue cette fois en solo et porte l’intégralité du développement seul. Et sans faire 36 détours, il est évident à la vue de l’expérience de jeu proposée, qu’ils sont aussi géniaux en animation que malhabile en matière de game design et création de jeu.

Si vous en avez marre des les entendre, tuez les monstres sonnant les cloches, sinon passez votre chemin
La première chose qui choque quand on commence l’aventure, c’est une maniabilité à se taper la tête contre les murs. Le pad Nec dispose d’une croix directionnelle tout ce qu’il y a de plus classique. Alors que le jeu est intégralement créé en 3D isométrique, le studio décide de ne pas utiliser les 4 directions de la croix mais les intermédiaires. En gros pour avancer, il faut appuyer sur les diagonales. D’emblée c’est déroutant et certains pourront trouver ça même assez contre intuitif voire pénible. L’autre point flagrant, c’est la lenteur . Le jeu rame quasiment tout le temps et ne doit rarement dépasser les 20 Fps. On se retrouve même sous la barre des 10 à certains moments. Notamment durant les quelques affrontements approximatifs ponctuant le parcourt de Misa vers la sortie. Ces duels ne proposant aucune difficulté, ni stratégie, il suffit d’appuyer à répétition sur le bouton d’attaque pour occire ces adversaires à l’IA inexistante.
De type donjon aventure, on attendait également de ce jeu, quelques énigmes ainsi qu’un peu challenge dans la progression. Il n’en est rien. Vous pouvez sporadiquement ramasser quelques objets dont la plupart ne servent à rien ainsi que quelques armes à l’inutilité tout aussi évidente. Durant l’heure et demie qui compose cette aventure, seule l’utilisation de deux trois candélabres pour activer une flamme et ouvrir deux trois portes, risquent éventuellement de demander un peu de recherche. Le reste se résume à une promenade dans quelques décors à l’ambiance assez réussie.

Un double démoniaque qui va vous suivre le temps de trouver la prochaine échelle
La majorité des ennemis du jeu peuvent être esquivés et si l’envie vous en vient de les affronter, les hitbox douteuses et la baisse de framerate auront vite raison de votre bonne volonté. Par ailleurs, Misa dispose d’une barre de vie assez conséquente, représentée par 4 orbes de couleurs différentes. Le jeu s’amuse également à faire évoluer la tenue du personnage et Gainax s’applique à transformer peu à peu sa petite princesse en amazone à la tenue légère. Un autre point assez étrange mais intéressant, est le nombre d’idées amenées dans le jeu : un monstre qui se transforme en un double maléfique de l’héroïne, d’autres qui sonnent des cloches et que l’on peut éliminer afin d’obtenir un peu de silence, la possibilité d’interagir avec certains éléments… La question est pourquoi toutes ces idées sont à peine esquissées et que dans une grande majorité, elles ne servent à rien dans la progression et n’incarne en aucune manière une quelconque opposition au joueur ? Et bien pourquoi pas j’ai envie de vous dire. Et pourquoi pas non plus amener une fin totalement abrupte se déclenchant devant le pied de la statue centrale du château, après avoir démonté à coup de gourdin deux suppôts du démon sous ventoline ? Hein ? Pourquoi pas finalement…
Que dire de plus, si ce n’est que Gainax ne tire aucun profit du format CD de la console, puisque au-delà de la vidéo d’introduction et du générique de fin, aucune musique n’est jouée sur le format CD et on écope de quelques mélodies midi discrètes, à peine inspirées, tentant de rappeler sommairement quelques airs moyen-orientaux. Il y a de quoi tousser, quand on pense à la qualité musicale des animés Gainax, ou qu’on se dit que sur Super Nintendo Nobuo Uematsu signait la bande-son de Final Fantasy VI en cette même année de 1994. Durant les deux trois vidéos entrecoupant les phases d’exploration, les personnages ne parlent pas et sont justes sous-titré. Concernant le sound design et les bruitages, hélas ils n’échappent pas au naufrage d’un jeu qui tient plus du prototype que d’une version finale.

Deux doubles planches d’époque montrant l’évolution et le travail sur le personnage et les idées de gameplay misent en chantier et qui sont dans l’ensemble restées en l’état. On voit aussi le soin apporté à l’évolution de la tenue de l’héroïne qui change 3 fois d’apparence et donc de sprite durant la courte aventure.