Il existe des personnes qui ont un truc en plus que le commun des mortels, une vision… Il suffit de lire Tolkien ou Lovecraft pour s’en rendre compte. Mais outre les Lettres, art parmi les arts, le JV a vu passer lui aussi son lot de visionnaires, de développeurs ayant laissé leur marque dans cette industrie que nous aimons tant. Benoît Sokal et sa fabuleuse série Syberia, mêlant automates et mammouths. Les frères Twins qui donnèrent vie au farfelu Dizzy, œuf aventureux et portant des gants de boxe ( l’humour anglais, j’adore… ). Eric Chahi, petit frenchie entrant dans la légende grâce à son mythique Another World. Que de grands noms…
De nos jours, à l’ère du « toujours plus », des jeux plus beaux, plus chers, nécessitant de plus grandes équipes, et bien il faut avouer que l’intérêt des titres va quant à lui en décroissant. Nous sommes passés d’œuvres à produits, de voyage à lobotomie… Triste constat. Mais la lumière n’est pas encore éteinte, les amis ! Oh que non. La scène homebrew est là pour nous rappeler que l’argent ne fait pas tout et que la passion prime sur les moyens. Depuis quelques années, nos vieilles machines revivent et voient leur ludothèque s’agrandir. Avez-vous déjà entendu parler de la théorie des technologies désuètes ? C’est là un autre débat… Mais tout cela pour en venir au fait qu’il y’a bien heureusement encore des gens qui souhaitent juste faire rêver les joueurs, but premier du JV. Si je vous dis par exemple que « l’ordinateur personnel le plus vendu au monde », le Commodore 64, se porte à merveille et que de nombreux développeurs de talent sortent des nouveaux jeux géniaux dessus, le croirez-vous ? C’est pourtant bel et bien le cas. L’antique machine qui fit le bonheur de plein de gamers dans les années 80 accueille même son tout premier RPG au tour par tour à la japonaise, rien que ça… C’est ce jeu qui nous intéresse aujourd’hui.
Le nom Sarah Jane Avory peux se ranger aux côtés des sommités citées plus haut. Développeuse réputée sur C64 pour ses shoot ‘em up, elle sort fin 2021 la première partie de son « grand œuvre » : le premier opus d’une trilogie de RPG tirés de ses livres ( la dame étant également écrivain de romans fantastiques ). C’est donc avec des étoiles dans les yeux, pour le coup je suis vraiment retombé en enfance, que j’ai acheté le jeu Briley Witch Chronicles. Après une trentaine d’heures à arpenter son monde féerique, je peux dors et déjà commencer ce test par la fin : ce titre est une bombe ! Maintenant, laissez-moi vous expliquer en détails pourquoi ce nouveau RPG me fait dire que le JV tel que je l’entend, une porte ouverte sur un ailleurs fantasmagorique, revient peu à peu à lui. Les souliers de Dorothy, cela vous dit quelque chose ? Et bien Briley Witch Chronicles a le même pouvoir…
Un voyage initiatique…
Une maison plutôt cosy et moderne, un chat noir qui dort nonchalamment, notre héroïne qui arrive stressée comme tout… Briley est une jeune femme de son temps. Développeuse en herbe, son travail lui demande beaucoup. Apparemment, quelques soucis font qu’elle doive redoubler d’efforts ( les fameux « crunch » ? ) et c’est donc énervée qu’elle rentre chez elle. Un coup de fil de sa mère parvient à lui faire retrouver quelque peu son calme et elle décide de suivre son conseil de prendre un petit temps pour méditer. Il faut toujours écouter sa mère. Pour cela, nous avons besoin de bougies. Et nous voici donc dans un petit tutoriel nous apprenant à gérer le menu et la maniabilité. Nous faisons également la connaissance de Smokey, notre chat qui tiendra un rôle de premier plan dans cette aventure ( pas étonnant quand on connaît l’amour de Sarah Jane Avory pour nos chers félins ) et avec lequel sa maîtresse parvient à parler, premier signe qu’elle est spéciale.
Après avoir déniché des bougies et mise en place celles-ci sur un petit autel à encens, Briley laisse son esprit voguer tranquillement… Le calme l’envahit… Quand soudain une grande silhouette encapuchonnée et effrayante lui apparaît directement en esprit. Une voix caverneuse semblant venir d’un ailleurs lointain et obscur résonne dans sa tête : « Petite Briley… Tu es à moi !Tu m’appartiens… ». Briley à peur et aucun moyen de revenir à elle, puis elle se sent partir… Trou noir…
Plusieurs voix d’hommes semblent débattre de choses importantes, Briley ouvre doucement les yeux. Elle est dehors, allongée à même le sol, et non loin de là un feu de camp peint des traits rougeâtres et mouvants sur le visage d’hommes durs, de paysans. Complètement désorientée, elle fait du bruit et les hommes la remarquent alors. Éberlués par cette apparition soudaine, certains d’entre eux crient à la sorcellerie quand s’élève la voix de Leofard. Apparemment respecté par ses pairs, ce dernier déclare que ce n’est qu’une jeune fille perdue et qu’elle l’accompagnera sous son toit pour que sa femme s’en occupe. Briley a la bonne surprise de voir que son chat Smokey fut lui aussi emporté et elle le récupère avant de docilement suivre son sauveur, ne comprenant rien à ce qui est en train de se passer. Elle finit par faire la connaissance de la famille de ce Leofard. Sa femme, Clarissa, accepte qu’elle reste parmi eux, le temps de trouver le pourquoi de sa présence, si elle l’aide dans son travail qui est la distribution journalière de pain pour les habitants du village. Briley accepte, elle y est bien obligée, et ainsi commence sa nouvelle vie à Maepole. Quel est cet endroit ? Pourquoi à t’elle été emportée loin de chez elle ? Quelle est donc l’entité malfaisante qui fit apparemment usage de magie sur elle ? Tant de réponses qu’il faudra trouver en avançant dans cette fabuleuse histoire. « Tu m’appartiens… », ces mots lui reviennent en tête alors qu’elle s’allonge avec Smokey pour passer sa première nuit dans ce monde inconnu.
Le scénario de Briley Witch Chronicles est un régal et tient le joueur en haleine tout du long, aucun temps mort. Féerie, action, romance… Celui-ci, et à raison, fait très « bouquin », comme découpé en chapitres. Chaque journée de travail de Briley, notre nouvellement livreuse de pain, va être bien remplie. Vous savez déjà qu’elle va se révéler être une sorcière, ce qui n’est pas vraiment mieux vu que dans notre moyen-âge à nous. Sachez aussi qu’elle va faire beaucoup de rencontres, bonnes comme mauvaises, et que les nombreux personnages secondaires sont très bien amenés et développés. J’ai beaucoup pensé à la série Twilight en y jouant. Le côté romantique peut-être… Envoûtant.

Notre arrivée tumultueuse… (à gauche)
Pixel Perfect…
Je suis un amoureux du pixel-art, vraiment. Pour illustrer ces propos avec un exemple qui parlera à tous en ce moment : je préfère de loin le travail actuel de Dotemu sur Les Tortues Ninjas plutôt que le trop lisse Street of Rage 4. Vous voyez le genre. Donc, suis-je objectif lorsque je teste ces nouveautés sur C64 ? Sûrement que non. Même les titres les plus basiques, la ludothèque de folie du célèbre micro-ordinateur regorge de jeux sur fond noir, parviennent à m’enchanter. Disons que je suis « bon public ». Mais alors là, chers lecteurs, nous atteignons réellement des sommets. Pas de fonds vides ici mais des décors chatoyants superbement réalisés, et ce quelque soit l’environnement ( forêt, ville, caverne… ). Mention spéciale pour le monde onirique aux tons violets et plein de rochers arborant un visage mouvant. Un rêve… D’ailleurs, la palette de couleurs du Commodore est vraiment mise en valeur. C’est tout simplement magnifique. Les sprites des personnages sont très cools, j’ai apprécié tout particulièrement la représentation des sorcières avec leur grand nez crochu. Et quand on sait la taille des différentes zones du jeu, on ne peux que respecter le fait que Sarah Jane Avory ai créé ce monde toute seule. C’est dingue… Pour enfoncer le clou, au bout de quelques heures de jeu nous avons même le droit à une carte du monde du plus belle effet.
Histoire de sublimer encore son univers imaginaire, la développeuse à composé des musiques juste en parfaite harmonie avec le visuel à l’écran. Le thème principal est plaisant et l’on se prend à le siffloter tout en vaquant à nos occupations de jeune sorcière. Mais l’ambiance sait se faire plus mystérieuse ou épique pour souligner les moments cruciaux de l’aventure et les combats. Les bruitages sont également très bons. Le côté sonore a donc reçu le même traitement de faveur que le côté graphique pour un mariage heureux. Meilleurs vœux !
Que de louanges mais quoi d’autre ? Alors que toutes ces merveilles sortent d’un seul cerveau, le résultat final dépasse les « triple A » de la machine. La réalisation de Briley Witch Chronicles approche la perfection, je n’ai pas peur de le dire. Peu de RPG de la génération 8 bits peuvent se targuer de lui arriver à la cheville. Un must du genre.

Cercles de pierre et esprits fantomatiques, de quoi créer une ambiance romanesque
Simple et efficace…
A l’instar de sa réalisation de haut-vol, j’ai trouvé la maniabilité au top. Là encore, il n’y a rien de mauvais à dire sur celle-ci. Un seul bouton pour tout faire. Et oui, nous avons là un RPG se jouant à un seul bouton. Laissez-le enfoncé pour accéder au menu et faites de même pour en sortir. Toujours le même bouton en appuyant subrepticement pour observer et agir. Bien entendu, le joystick sert à se mouvoir et à naviguer dans le menu. Simple comme bonjour.
Celui-ci est tout à fait ergonomique et propose les rubriques habituelles du genre : inventaire, status, skills, save, ect… Une fonctionnalité bien pratique est le remind, « rappeler » dans la langue de Molière. Cela arrive qu’après être sortit d’un jeu de ce type pendant quelques jours, on ne se souvient plus de tout. Et bien en cliquant sur remind, Briley et Smokey ont un dialogue nous rappelant les tâches en cours. Comprenez d’ailleurs que le titre n’est proposé qu’en anglais, mais assez basique et ne demandant que quelques notions pour suivre l’histoire.
Nous sommes une sorcière et qui dit sorcellerie dit potions magiques. Au bout d’un certain temps de jeu, nous ferons l’acquisition d’un chaudron et pourrons donc concocter des mixtures ayant divers effet comme restaurer la santé ou la magie, il y’a même des potions spéciales pour les chats. Il nous faudra bien entendu récolter divers ingrédients se trouvant un peu partout. Les recettes se débloquent en gagnant de l’expérience ou à certains moments clés du scénario, même système pour les sorts. Boules de feu, dard magique, souffle de glace, ect… pourront viser un ennemi précis ou tout un groupe. Idem pour notre fidèle compagnon félin dont les coups de griffes deviendront de plus en plus efficaces. Quelques personnages nous accompagneront à certains moments de l’aventure et il en va de même pour eux.
Les combats se déroulent au tour par tour de la manière la plus classique qui soit. Il est recommandé de bien réfléchir à ses actions, sous peine de voir apparaître l’écran de game over. Spamer la commande attaque n’amènera rien de bon. Le jeu propose deux niveaux de difficulté : facile et normal. J’ai choisis ce dernier et je peux vous dire que certains passages se sont montrés des plus corsés, les ennemis spawnant à un rythme soutenu et leur niveau progressant rapidement. Petit détail bien embêtant : durant la première moitié de l’aventure, notre seul moyen de restaurer notre jauge de magie sera de finir notre journée et de dormir. Avant cela, il faudra bien sûr régler les problèmes journaliers. Laissez-moi vous conter une mésaventure qu’il m’est arrivé : j’avais une chose à trouver dans une forêt mal-famée mais seulement, gros bêta que je suis parfois, je m’étais amusé à essayer mes sorts les plus puissants jusqu’à me trouver à cours de magie. Vous voyez la tuile venir ? Je n’ai jamais réussi à traverser cette maudite forêt et me suis retrouvé forcé de recommencer une partie, perdant du même coup quelques heures de progression ( et me rappelant de faire plusieurs sauvegardes ). Vous voilà prévenus.
Nous avons donc une maniabilité intuitive au possible. Comment faire plus simple qu’un seul bouton pour tout gérer ? On se sent vraiment à l’aise joystick en main et le menu est assez succin pour ne pas que le joueur s’y perde. Encore un point fort pour Briley Witch Chronicles.

N’est elle pas jolie cette carte ?